• Léo Ferré - Les Corbeaux (Rimbaud)

    Seigneur, quand froide est la prairie,
    Quand dans les hameaux abattus,
    Les longs angélus se sont tus...
    Sur la nature défleurie
    Faites s'abattre des grands cieux
    Les chers corbeaux délicieux
    Les chers corbeaux délicieux.

    Armée étrange aux cris sévères,
    Les vents froids attaquent vos nids!
    Vous, le long des fleuves jaunis,
    Sur les routes aux vieux calvaires,
    Sur les fossés et sur les trous
    Dispersez-vous, ralliez-vous!
    Dispersez-vous, ralliez-vous!

    Par milliers, sur les champs de France,
    Où dorment des morts d'avant-hier,
    Tournoyez, n'est-ce pas, l'hiver,
    Pour que chaque passant repense!
    Sois donc le crieur du devoir,
    Ô notre funèbre oiseau noir!
    Ô notre funèbre oiseau noir!

    Mais, saints du ciel, en haut du chêne,
    Mât perdu dans le soir charmé,
    Laissez les fauvettes de mai
    Pour ceux qu'au fond du bois enchaîne,
    Dans l'herbe d'où l'on ne peut fuir,
    La défaite sans avenir
    La défaite sans avenir.


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  • François Béranger - Les oiseaux mécaniques

     Quand les oiseaux n'étaient pas mécaniques
    Il y a bien de cela trente ans
    Ils chantaient tous de façon anarchique
    Dans des arbres de trois cent ans
    Ils pondaient des œufs
    Dans des nids bien à eux
    Maintenant grâce à nous les mutants
    Dans le béton brut, plus d'impondérables
    Ça ne sera jamais plus comme avant

    Quand les oiseaux n'étaient pas mécaniques
    Il y a bien de cela trente ans
    On nous a montré au programme scientifique
    De la populo-video
    Les ravages iniques
    De ces êtres merdiques
    Qui salissaient les monuments
    Sans compter les risques
    Pour la santé publique
    Contenus dans leurs excréments

    Quand les oiseaux n'étaient pas mécaniques
    Il y a bien de cela trente ans
    Nos technocrates
    Béni soit leur saint nom
    Trouvèrent la solution pratique
    Pour supprimer radicalement
    Tous ces vecteurs de parasites
    Ils coupèrent les arbres
    Ces machins verdâtres
    Pour y faire pousser du ciment

    Quand les oiseaux n'étaient pas mécaniques
    Il y a bien de cela trente ans
    On trouvait éminemment poétique
    D'aller souvent perdre du temps
    Sous les ombres ...
    Des forêts putrides
    A écouter leurs pépiements
    On dirait une fable
    Vraiment peu croyable
    S'il n'y avait des documents


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  •     L'alouette (Je ne peux parler que d'amour)

    Guy Béart

    L'hirondelle a pris la fuite
    De ma ville qui s'agite
    Plus un oiseau ne l'habite
    Ils sont partis pour toujours
    Il me reste une alouette
    Au cœur de ma maisonnette
    Par ma voix elle répète
    "Je ne peux que parler d'amour" (x3)

    Alouette, dès l'aurore
    Tu t'éveilles, tu picores
    Et pour toi je chante encore
    Malgré le froid des faubourgs
    Alouette du village
    Si petite, forte et sage
    Tu me donnes du courage
    Je ne peux que parler d'amour (x3)

    Alouette, tu t'enrhumes
    Dans la ville sous la brume
    Les mauvais garçons te plument
    Tu m'appelles au secours
    Alouette, ô alouette
    Tu n'as plus rien sur la tête
    On te plume et tu répètes
    "Je ne peux que parler d'amour" (x5)


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  •                                                                   Georges Brassens    Jean Richepin

     

     

    Ô vie heureuse des bourgeois
    Qu'avril bourgeonne
    Ou que décembre gèle,
    Ils sont fiers et contents

    Ce pigeon est aimé,
    Trois jours par sa pigeonne
    Ça lui suffit il sait
    Que l'amour n'a qu'un temps

    Ce dindon a toujours
    Béni sa destinée
    Et quand vient le moment
    De mourir il faut voir

    Cette jeune oie en pleurs
    C'est là que je suis née
    Je meurs près de ma mère
    Et je fais mon devoir

    Elle a fait son devoir
    C'est à dire que onques
    Elle n'eut de souhait
    Impossible elle n'eut

    Aucun rêve de lune
    Aucun désir de jonque
    L'emportant sans rameur
    Sur un fleuve inconnu

    Et tous sont ainsi faits
    Vivre la même vie
    Toujours pour ces gens là
    Cela n'est point hideux

    Ce canard n'a qu'un bec
    Et n'eut jamais envie
    Ou de n'en plus avoir
    Ou bien d'en avoir deux

    N'avoir aucun besoin
    De baiser sur les lèvres
    Et loin des songes vains
    Loin des soucis cuisants

    Posséder pour tout coeur
    Un viscère sans fièvre
    Un coucou régulier
    Et garanti dix ans

    Ô les gens bien heureux
    Tout à coup dans l'espace
    Si haut qu'ils semblent aller
    Lentement en grand vol

    En forme de triangle
    Arrivent planent, et passent
    Où vont ils? ... qui sont-ils ?
    Comme ils sont loin du sol

    Regardez les passer, eux
    Ce sont les sauvages
    Ils vont où leur désir
    Le veut par dessus monts

    Et bois et mers et vents
    Et loin des esclavages
    L'air qu'ils boivent
    Ferait éclater vos poumons

    Regardez les avant
    D'atteindre sa chimère
    Plus d'un l'aile rompue
    Et du sang plein les yeux

    Mourra. Ces pauvres gens
    Ont aussi femme et mère
    Et savent les aimer
    Aussi bien que vous mieux

    Pour choyer cette femme
    Et nourrir cette mère
    Ils pouvaient devenir
    Volailles comme vous

    Mais ils sont avant tout
    Des fils de la chimère
    Des assoiffés d'azur
    Des poètes des fous

    bis
    Regardez les vieux coqs
    Jeune oie édifiante
    Rien de vous ne pourra
    Monter aussi haut qu'eux

    Et le peu qui viendra
    D'eux à vous
    C'est leur fiante
    Les bourgeois sont troublés
    De voir passer les gueux

    Jean Richepin chanté par Brassens

     

     

     

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  • Un jour, sur un piano,
    Une puce élut domicile.
    Elle posa son sac à dos,
    Ses affaires de ville.
    Elle avait beaucoup voyagé,
    Beaucoup sauté, beaucoup piqué
    Et pour ne pas qu'on la voie,
    Sur une noire, elle s'installa.

    Mais soudain, la lumière apparut.
    Des sons frappèrent son oreille.
    Une main lui marchait dessus.
    Sa colère fut sans pareille.
    Elle suivit ses évolutions
    Avec des yeux pleins d'attention
    Pour essayer de grimper
    Sur la main qui l'avait piétinée.
     
    Lorsqu'enfin, elle y parvint,
    Elle affina son aiguille
    Et se mit à piquer la main
    Tout en dansant le quadrille,
    Mais, soudain, la main s'agita
    Et son rythme s'accéléra
    Et la puce tout excitée,
    De plus belle, se remit à piquer.

    Dans la douleur et la démangeaison
    La main se faisait plus rapide,
    Ne suivait plus la partition
    Et n'avait plus aucun guide
    Mais dans la salle on applaudissait
    Sans deviner que c'était
    Grâce à une puce énervée
    Que le jazz était né.
                                                  Yves Duteil 

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