•                    Georges Brassens

    En ce temps-là, je vivais dans la lune
    Les bonheurs d'ici-bas m'étaient tous défendus
    Je semais des violett's et chantais pour des prunes
    Et tendais la patte aux chats perdus...

    Ah ah ah ah! putain de toi!
    Ah ah ah ah ah ah! pauvre de moi...

    Un soir de plui', v'là qu'on gratte à ma porte
    Je m'empresse d'ouvrir (sans doute un nouveau chat!)
    Nom de Dieu! l'beau félin que l'orage m'apporte
    C'était toi, c'était toi, c'était toi...

    Ah ah ah ah! putain de toi!
    Ah ah ah ah ah ah! pauvre de moi...

    Les yeux fendus et couleur de pistache
    T'as posé sur mon coeur ta patte de velours...
    Fort heureus'ment pour moi, t'avais pas de moustache
    Et ta vertu ne pesait pas trop lourd...

    Ah ah ah ah! putain de toi!
    Ah ah ah ah ah ah! pauvre de moi...

    Aux quatre coins de ma vi' de bohème
    Tu as prom'né, tu as prom'né le feu de tes vingt ans
    Et pour moi, pour mes chats, pour mes fleurs, mes poèmes
    C'était toi, la pluie et le beau temps...

    Ah ah ah ah! putain de toi!
    Ah ah ahah ah ah! pauvre de moi...

    Mais le temps passe et fauche à l'aveuglette
    Notre amour mûrissait à peine que, déjà
    Tu brûlais mes chansons, crachait sur mes violettes
    Et faisais des misères à mes chats...

    Ah ah ah ah! putain de toi!
    Ah ah ah ah ah ah! pauvre de moi...

    Le comble enfin, misérable salope
    Comme il n'restait plus rien dans le garde-manger
    T'as couru sans vergogne, et pour une escalope
    Te jeter dans le lit du boucher!

    Ah ah ah ah! putain de toi!
    Ah ah ah ah ah ah! pauvre de moi...

    C'était fini, t'avais passé les bornes
    En r'nonçant aux amours frivoles d'ici-bas
    J'suis r'monté dans la lune en emportant mes cornes
    Mes chansons, et mes fleurs, et mes chats...

    Ah ah ah ah! putain de toi!
    Ah ah ah ah ah ah! pauvre de moi...


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  •                          Georges Brassens

    Pour changer en amour notre amourette
    Il s'en serait pas fallu de beaucoup
    Mais, ce jour là, Vénus était distraite
    Il est des jours où Cupidon s'en fout. (bis)

    Des jours où il joue les mouches du coche
    Où, elles sont émoussées dans le bout
    Les flèches courtoises qu'il nous décoche
    Il est des jours où Cupidon s'en fout. (bis)

    Se consacrant à d'autres imbéciles
    Il n'eu pas l'heur de s'occuper de nous
    Avec son arc et tous ses ustensiles
    Il est des jours où Cupidon s'en fout. (bis)

    On tenté sans lui d'ouvrir la fête
    Sur l'herbe tendre, on s'est roulés, mais vous
    Avez perdu la vertu, pas la tête
    Il est des jours où Cupidon s'en fout. (bis)

    Si vous m'avez donné toute licence
    Le cœur, hélas, n'était pas dans le coup;
    Le feu sacré brillait par son absence
    Il est des jours où Cupidon s'en fout. (bis)

    On effeuilla vingt fois la marguerite
    Elle tomba vingt fois sur «pas du tout»
    Et notre pauvre idylle a fait faillite
    Il est des jours où Cupidon s'en fout. (bis)

    Quand vous irez au bois conter fleurette
    Jeunes galants, le ciel soit avec vous
    Je n'eus pas cette chance et le regrette
    Il est des jours où Cupidon s'en fout. (bis)


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  •  

    La Religieuse
     
    Tous les cœurs se rallient à sa blanche cornette
    Si le chrétien succombe à son charme insidieux
    Le païen le plus sûr, l'athée le plus honnête
    Se laisseraient aller parfois à croire en Dieu
    Et les enfants de chœur font tinter leur sonnette
     
    Il paraît que, dessous sa cornette fatale
    Qu'elle arbore à la messe avec tant de rigueur
    Cette petite sœur cache, c'est un scandale
    Une queu' de cheval et des accroche-cœurs
    Et les enfants de chœur s'agitent dans les stalles
     
    Il paraît que, dessous son gros habit de bure
    Elle porte coquettement des bas de soie
    Festons, frivolités, fanfreluches, guipures
    Enfin tout ce qu'il faut pour que le diable y soit
    Et les enfants de chœur ont des pensées impures
     
    Il paraît qu'à loisir elle se mire nue,
    De face, de profil, et même, hélas ! de dos,
    Après avoir, sans gêne, accroché sa tenue
    Aux branches de la croix comme au portemanteau.
    Chez les enfants de choeur le malin s'insinue...

    Il parait que, levant au ciel un oeil complice,
    Ell' dit: "Bravo, Seigneur, c'est du joli travail !"
    Puis qu'elle ajoute avec encor plus de malice :
    "La cambrure des reins, ça, c'est une trouvaille !"
    Et les enfants de choeur souffrent un vrai supplice...

    Il parait qu'à minuit, bonne mère, c'est pire :
    On entend se mêler, dans d'étranges accords,
    La voix énamouré’ des anges qui soupirent
    Et celle de la soeur criant "Encor ! Encor !"
    Et les enfants de choeur, les malheureux, transpirent...

    Et monsieur le curé, que ces bruits turlupinent,
    Se dit avec raison que le brave Jésus
    Avec sa tête, hélas ! déjà chargé’ d'épines,
    N'a certes pas besoin d'autre chose dessus.
    Et les enfants de choeur, branlant du chef, opinent...

    Tout ça, c'est des faux bruits, des ragots, des sornettes,
    De basses calomni’s par Satan répandu’s.
    Pas plus d'accroche-coeurs sous la blanche cornette
    Que de queu’ de cheval, mais un crâne tondu.
    Et les enfants de choeur en font, une binette...

    Pas de troubles penchants dans ce coeur rigoriste,
    Sous cet austère habit pas de rubans suspects.
    On ne verra jamais la corne au front du Christ,
    Le veinard sur sa croix peut s'endormir en paix,
    Et les enfants de choeur se masturber, tout tristes...

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  •             Guy Béart

    J'ai passé ma vie
    À des théories
    Et la vie va, la vie va
    La vie va, va, va,
    Des années entières
    Auprès de lumières
    Qui ne brillaient pas
    Et la vie s'en va
    J'ai fait des rencontres,
    J'étais pour ou contre,
    Et la vie va, la vie va {etc...}

    On s'est dit des choses,
    Tandis que les roses
    Tombaient sous nos pas
    Mais la vie s'en va

    Mon père, mon grand-père
    Vendaient d' la poussière,
    Et la vie va, la vie va {etc...}

    Soufflant sur leur tête
    Un coup de vent bête
    Soudain les ruina
    Et la vie s'en va

    Où est ma jeunesse
    Folle de sagesse
    Et la vie va, la vie va {etc...}

    Dans mes années tendres
    Je n'ai su qu'attendre
    Le cri que voilà
    Mais la vie s'en va

    J'ai forgé des chaînes
    Pour nos joies, nos peines
    Et la vie va, la vie va {etc...}

    Des serrures fortes
    Pour nos maisons mortes
    Qui croulaient déjà
    Et la vie s'en va

    J'ai voulu te dire
    J'aurais dû sourire
    Et la vie va, la vie va {etc...}

    J'ai voulu comprendre
    J'aurais dû te prendre
    L'autre emporta
    Mais la vie s'en va

    J'ai fait des épures
    Sur la terre dure
    Et la vie va, la vie va {etc...}

    Grattant sur la jungle
    J'ai usé mes ongles
    La forêt gagna
    Et la vie s'en va

    Fallait trouver l'arbre
    J'ai cherché le marbre
    Et la vie va, la vie va {etc...}

    Quand la vie s'arrête
    Comme elle est parfaite
    Cette pierre-là
    Et la vie s'en va
    J'ai fait mes armoires
    Pour des robes noires
    Et la vie va, la vie va {etc...}

    Pour les fleurs les vases
    Pour les hommes les cases
    Pour les morts les draps
    Mais la vie s'en va

    J'ai perdu mon père
    J'ai perdu ma mère
    Et la vie va, la vie va {etc...}

    Mes enfants, sans doute
    Me perdront en route
    Je ne change pas
    Et la vie s'en va

    J'ai lu dans les livres
    À quoi sert de vivre
    Et la vie va, la vie va {etc...}

    Les discours qui trichent
    La vie, elle s'en fiche
    Elle ne les lit pas
    Et la vie s'en va


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  •              Guy Béart

    Je suis né dans un arbre
    Et l'arbre on l'a coupé
    Dans le soufre et l'asphalte
    Il me faut respirer
    Mes racines vont sous le pavé
    Chercher une terre mouillée
    Qui suis-je
    Qu'y puis-je
    Dans ce monde en litige
    Qui suis-je
    Qu'y puis-je
    Dans ce monde en émoi ?
    On m'a mis à l'école
    Et là j'ai tout appris
    Des poussières qui volent
    À l'étoile qui luit
    Une fois que j'ai tout digéré
    On me dit "Le monde a changé !"
    Qui change
    Qui range
    Dans ce monde en mélange
    Qui change
    Qui range
    Dans ce monde en émoi ?
    On m'a dit "Faut te battre !"
    On m'a dit "Vas-y !"
    On me donne une grenade
    On me flanque un fusil
    Une fois qu'on s'est battu beaucoup
    On me dit "Embrassez-vous !"
    Qui crève
    Qui rêve
    Dans ce monde sans trêve
    Qui crève
    Qui rêve
    Dans ce monde en émoi ?
    J'ai pris la route droite
    La route défendue
    La route maladroite
    Dans ce monde tordu
    En allant tout droit tout droit tout droit
    Je me suis retrouvé derrière moi !
    Qui erre
    Qui espère
    Dans ce monde mystère
    Qui erre
    Qui espère
    Dans ce monde en émoi ?
    On m'a dit "la famille",
    Les dollars les autos
    On m'a dit "la faucille",
    On m'a dit "le marteau",
    On m'a dit on m'a dit on m'a dit
    Et puis on s'est contredit !
    Qui pense
    Qui danse
    Dans cette effervescence
    Qui pense
    qui danse
    Dans ce monde en émoi ?
    Mes amours étaient bonnes
    Avant que les docteurs
    Me disent que deux hormones
    Nous dirigent le cœur
    Maintenant quand j'aime je suis content
    Que ça ne vienne plus de mes sentiments !
    Qui aime
    Qui saigne
    Dans ce monde sans thème
    Qui aime
    Qui saigne
    Dans ce monde en émoi ?
    Et pourtant je me jette
    Et j'aime et je me bats
    Pour des mots pour des êtres
    Pour cet homme qui va
    Tout au fond de moi je crois je crois
    Je ne sais plus au juste en quoi !
    Qui suis-je
    Qu'y puis-je
    Dans ce monde en litige
    Qui suis-je
    Qu'y puis-je
    Dans ce monde en émoi ?

     


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